"Architecture et photographie" :
Ces travaux montrent des volumes simples et des maquettes d'architectures sur lesquels des images photographiques sont projetées. Le principe de la projection est important car celle-ci se déploie dans l'espace et éclaire les objets qu'elle recouvre; elle est considérée comme un mode d'éclairage complexe qui se combine avec d'autres sources lumineuses.
Cette lumière codifiée par l'image photographique elle-même se fixe sur divers plans de projections. Il s'agit de questionner fictivement la matérialité de l'image, sa surface, son épaisseur, sa densité, son dessous, son à coté, son entre-deux, son dessus: l'image photographique projetée devient-elle une forme de réel et ce type d'assemblage ou de montage invente-t-il une nouvelle réalité ?
Patrick Tosani
Une effervescence de fleurs sourdes, surplombe sur un fond noir, une scène reprise du Préau de fous de Francisco de Goya ( Saragosse 1793). La folie et la perte du langage n?ont cessé de hanter l?artiste (série des Génies). Les âmes-fleurs dont on ne sait si elles s?élèvent ou si elles tombent comme une pluie sur les personnages épris de délire ou de prostation, s?offrent comme une geste de compassion. Comme souvent l?artiste allie puissance, violence et douceur pour évoquer notre propre condition à la fois soumise à la raison et à l?irrationnel.
Sans former en soi une série, les oeuvres inscrites dans la familiarité de Francisco de Goya, commencent à former un ensemble très conséquent dans le travail de Bruno Perramant. Goya comme Sade, formant pour l?artiste le couple fondateur de notre modernité.
"Architecture et peinture" :
L'application de peinture sur les maquettes d'une façon directe, aléatoire ou systématique, suivie de leurs mises en espace photographiques est un processus de recouvrement et de transformation d'un objet qui nous renvoie par l'image agrandie à un environnement urbain monumental et fictionnel. Il s'agit d'une réalité factuelle, celle de la peinture appliquée qui se transpose en une réalité imaginaire. Il y est question de l'impact de l'image, de la façon dont l'image s'accapare les formes et sature l'espace. Simuler ainsi des recouvrements et la prolifération des images dans la ville, c'est chercher ce passage où l'image en général (picturale, photographique, cinématographique) commence à recouvrir le réel et aurait tendance à devenir le réel.
La peinture qui recouvre chaque forme n'a pas occulté l'objet, elle en a métamorphosé son apparence. La photographie enregistre cet état des choses entre instabilité et mutation. Elle est une interrogation permanente de l'apparence des éléments, des objets, des corps. Toutes les modalités d'images que j'expérimente, questionnent cette apparence des choses pour en chercher leur corporéité et leur présence.
Patrick Tosani
L'artiste cherche à extraire des qualités inutilisées ou des propriétés cachées des objets qui nous font vivre. Les mélanges actifs qu'il opère se confrontent et prennent forme dans des équilibres précaires et instables.
Contourner les fonctions, désorganiser les savoir-faire sont des recherches qui nécessitent chez lui d'adopter un regard distancié. Ses créations recréent fréquemment des micro-phénomènes ou microcosmes.
Ici des feux d'artifices et matières explosives sont déclenchés dans du gel de pétrole polymérisé. Ne contenant aucune humidité, le produit absorbe et fixe l'instant ultime de l'explosion et la conserve sur elle-même dans toute sa géométrie. C'est un moment suspendu dans le gel, un souffle coincé dans son élan modelant une propagation forcée. L'artiste cherche à définir le bon calibre de feux d'artifices et matières explosives à insérer dans un gel de pétrole polymérisé.
Ne contenant aucune humidité, le produit absorbe et fixe l'instant ultime de l'explosion et la conserve sur elle-même dans toute sa géométrie. C'est un moment suspendu dans le gel, un souffle coincé dans son élan modelant une propagation forcée mais contenue.
Incrustées dans un mur ou posées au sol, ses explosions immergeront le visiteur dans l'espace, occasionnant ainsi de nouvelles perceptions et confrontations.
De part ces différentes échelles, l'artiste élargit son champ d'action ainsi que les possibilités d'introduire ses oeuvres dans de nouveaux lieux et espaces architecturaux.
« Même si je m'empare des matériaux, ceux-ci ont leur propre vie; c'est à dire leur résistance physique, leur densité, leur porosité, etc. Et parfois je ne peux rien faire d'autres que d'enregistrer les formes produites par les dérèglements que j'ai mis en place. Dans les sphères transparentes par exemple, c'est la qualité du lustre qu'elle contient, sa fragilité qui détermine sa vitesse de rotation, avec la casse de matériel que cela suppose.
Pour les tubes de plexiglas qui contiennent un gel de pétrole polymérisé et dans lequel j'introduis un feu d'artifice muni d'un détonateur. Là, je ne contrôle plus rien et bien évidemment, je n'ai pas la maitrise du résultat final.
Entre le rien et la catastrophe, il y a un espace que je dois maitriser et l'on peut dire que, le plus souvent, je marche sur un fil.»
Alpenglow est une série produite à partir d'une collection de photographies personnelles datant des années 1930. Les photographies, en noir et blanc, conservent leur format original (6 x 6 cm) et sont présentées à plat.
Sur chacune d'elles, un élément du premier plan - silhouette, objet - est détouré puis redressé verticalement, se détachant alors en relief de l'image. La photographie devient un théâtre miniature. Par sa présence - étymologiquement, ce qui est devant -, l'élément détouré fait obstacle au regard. Il appelle à être franchi, contourné, à aller voir ce que cache l'envers du décor.
Comme une petite boîte de conserve dont le couvercle serait relevé, la photograhie ouverte invite à s'y pencher.
Reste un espace blanc, évidé, une figure de l'absence. un espace dans lequel nous sommes susceptibles de nous glisser, de nous réfugier. Un espace blanc, couleur du tout, qui contient en lui-même toutes les couleurs du prisme, un espace des possibles.
Alpenglow invite à voir le spectacle de l'invisible, autant que le champ des possibles.
Extrait du catalogue monographique de Renaud Auguste-Dormeuil : "Include me Out" édité par le musée MAC/VAL (page 23)
Alpenglow est une série produite à partir d'une collection de photographies personnelles datant des années 1930. Les photographies, en noir et blanc, conservent leur format original (6 x 6 cm) et sont présentées à plat.
Sur chacune d'elles, un élément du premier plan - silhouette, objet - est détouré puis redressé verticalement, se détachant alors en relief de l'image. La photographie devient un théâtre miniature. Par sa présence - étymologiquement, ce qui est devant -, l'élément détouré fait obstacle au regard. Il appelle à être franchi, contourné, à aller voir ce que cache l'envers du décor.
Comme une petite boîte de conserve dont le couvercle serait relevé, la photograhie ouverte invite à s'y pencher.
Reste un espace blanc, évidé, une figure de l'absence. un espace dans lequel nous sommes susceptibles de nous glisser, de nous réfugier. Un espace blanc, couleur du tout, qui contient en lui-même toutes les couleurs du prisme, un espace des possibles.
Alpenglow invite à voir le spectacle de l'invisible, autant que le champ des possibles.
Extrait du catalogue monographique de Renaud Auguste-Dormeuil : "Include me Out" édité par le musée MAC/VAL (page 23)
Des logiciels performants permettent aujourd'hui de recomposer la carte du ciel à une date donnée, depuis n'importe quel point de la surface de la Terre. The Day Before_Star System donne à voir la carte du ciel, au format IGN, la nuit précédant une attaque aérienne visant des populations civiles. La série se compose de douze cieux étoilés, de Guernica la veille du 26 avril 1937 à Hiroshima le 5 août 1945 ou New York le 10 septembre 2001. Chacun porte la mention du lieu, de l'année, du jour et de la minute précédant son entrée dans la grande Histoire.
Chacune de ces voûtes célestes ressemble à s'y méprendre à la précédente. Toutes pourraient inviter à contempler le spectacle de la sereine beauté des étoiles, sur lesquelles les hommes projettent les lignes imaginaires des constellations et aiment à voir un théâtre des présages. Mais les ciels étoilés de The Day Before_Star System, tragiquement inscrits dans l'histoire, portent en eux le drame à venir. Ils disent la guerre, la violence et la mort sans les montrer, dans cet instant d'avant où tout reste encore possible, mais où pourtant tout est déjà joué. La partition est en place, entre "ceux qui savent" et "ceux qui ne savent pas".
12 ciels étoilés :
The Day Before_Guernica_April 25, 1937_23:59 ;
The Day Before_London_September 6, 1940_23:59 ;
The Day Before_Coventry_November 13, 1940_23:59 ;
The Day Before_Caen_Junes 5, 1944_23:59 ;
The Day Before_Dresden_February 12, 1945_23:59 ;
The Day Before_Hiroshima_August 5, 1945_23:59 ;
The Day Before_Nagasaki_August 8, 1945_23:59 ;
The Day Before_Hanoi_December 17, 1972_23:59 ;
The Day Before_Halabja_March 15, 1988_23:59 ;
The Day Before_Baghdad_January 15, 1991_23:59 ;
The Day Before_New York_September 10, 2001_23:59 ;
The Day Before_Baghdad_March 18, 2003_23:59.
Catalogue Renaud Auguste-Dormeuil : "Include me Out", MAC/VAL Museum Edition
"Or il n'y a aucune raison pour que le désir d'oeuvre du photographe et le désir d'image du portraituré coïncident : de ce fait, le portrait recontre toujours sa vérité dans la manière dont il négocie la tension entre des regards qui se croisent et qui s'éprouvent mutuellement" (Jean-Marie Schaeffer, Portraits, singulier pluriel, cat. exp., Paris, Mazan/BNF, 1997).
Les Collectionneurs est une série de portraits photographiques de collectionneurs d'art contemporain. La séance de prise de vue est réalisée dans un lieu déterminé par le commmanditaire, éventuellement entouré des objets qu'il a sélectionné. La composition et le cadrage de la photographie répondent à ses souhaits.
Les corps photographiés sont ensuite coupés et aspirés en leur milieu, les privant de leur visage - comme peut-être de leur ego. Tout en s'inscrivant dans la tradition du portrait des mécènes, Les Collectionneurs opère un renversement des lois du genre en privant le portraituré de son identité, le rendant anonyme ou quasiment. Amputés de leur visage, leur corps réduit à une fine silhouette, ces portraits déçoivent l'attente de "ressemblance" induite par le genre et contreviennent à la règle classique de mise en valeur du sujet présenté. Pour autant, notre identité est-elle consubstancielle à notre enveloppe charnelle ?
La construction/déconstruction de l'image obéit à un jeu de va-et-vient entre le collectionneur et l'artiste : le premier a mis en scène son propre portrait, ainsi que choisi le format d'impression et l'encadrement de l'image. Entre ces deux étapes, final cut (dans toute sa polysémie) opéré par l'artiste - ou comment exhiber ostensiblement l'enjeu de pouvoir qui sous-tend la fabrication de l'image, et du portrait en particulier.
Catalogue Renaud Auguste-Dormeuil : "Include me Out", MAC/VAL Museum Edition
Les Ambitieux est une série photographique ayant pour support des portraits officiels d'hommes d'Etat ou de pouvoir de l'histoire contemporaine.
Les corps photographiés de ces "grands hommes" sont ensuite coupés en deux et aspirés en leur milieu, les privant de leur visage - voire de leur ego. De cette opération de soustraction ne subsistent que l'enveloppe de la fonction et le décorum du pouvoir.
La quête du pouvoir est un travail laborieux, elle n'est jamais le fruit du hasard. C'est également le révélateur d'un ego surdimentionné. Sur le mode du momento mori ("souviens-toi que tu es mortel") que murmurait l'esclave au triomphateur romain habillé de pourpre et couronné de laurier, Les Ambitieux opère un effacement radical de l'expresson de cet ego.
Catalogue Renaud Auguste-Dormeuil : "Include me Out", MAC/VAL Museum Edition
Les Ambitieux est une série photographique ayant pour support des portraits officiels d'hommes d'Etat ou de pouvoir de l'histoire contemporaine.
Les corps photographiés de ces "grands hommes" sont ensuite coupés en deux et aspirés en leur milieu, les privant de leur visage - voire de leur ego. De cette opération de soustraction ne subsistent que l'enveloppe de la fonction et le décorum du pouvoir.
La quête du pouvoir est un travail laborieux, elle n'est jamais le fruit du hasard. C'est également le révélateur d'un ego surdimentionné. Sur le mode du momento mori ("souviens-toi que tu es mortel") que murmurait l'esclave au triomphateur romain habillé de pourpre et couronné de laurier, Les Ambitieux opère un effacement radical de l'expresson de cet ego.
Catalogue Renaud Auguste-Dormeuil : "Include me Out", MAC/VAL Museum Edition